Luge Canada

Gough orchestre une euphorie historique pour le Canada en luge Olympique

PYEONGCHANG Dans l'espace de 46,66 secondes, Alex Gough a vécu toutes les émotions possibles, et abattement s'est transformé en euphorie.

Dans l’espace de 46,66 secondes, Alex Gough a vécu toutes les émotions possibles, et abattement s’est transformé en euphorie.

Mardi soir à PyeongChang, l’étudiante en génie civil et quadruple Olympienne, 30 ans, est devenue le premier athlète canadien à gagner une médaille en luge aux Jeux Olympiques.

Elle avait été dans la course aux médailles tout au long des trois premières manches de compétition, mais à la suite de sa quatrième et dernière descente, elle n’était soudainement plus la maîtresse de son propre destin. Heureusement pour Gough et pour le Canada, la chance a enfin souri aux lugeurs canadiens aux Jeux Olympiques.

«De la déception la plus profonde jusqu’à la jubilation la plus complète,» a déclaré Gough, clairement soulagée, après avoir décroché sa médaille de bronze. Elle a été la troisième dernière à glisser en compétition féminine, et pour se garantir une médaille, elle devait franchir la ligne en première place, sinon elle risquait d’être écartée du podium.

Mais la compétitrice qui l’avait précédée en quatrième manche, l’Allemande Dajana Eitberger, avait inscrit le chrono le plus rapide de cette ronde, et Gough n’a pas su l’égaler (tout en enregistrant le troisième plus rapide chrono de cette ronde finale). Eitberger s’était garantie une médaille de bronze au tout minimum, et Gough n’y pouvait rien.

 «Je suis descendue après Dajana en quatrième manche; elle m’a devancée, et je savais qu’il y avait encore deux compétitrices en haut de la piste, et je serais fort probablement reléguée à quatrième place.»

La déception particulière de quatrième place est quelque chose que Gough connaît trop bien. À Sotchi, elle l’a vécue deux fois, en premier lieu dans la compétition féminine, et ensuite aux relais par équipes. Dans l’intervalle, elle a vu ses coéquipiers glisser vers quatrième place en luge double. Les résultats de quatrième place, le programme canadien de luge en a eu suffisamment pour toujours.

Pis encore, mardi soir à Pyeongchang, les deux compétitrices en haut de piste, celles qui avaient le pouvoir d’écarter Gough du podium, étaient deux anciennes médaillées d’or olympiques d’Allemagne. Ce serait un euphémisme de dire que l’Allemagne domine le sport de luge, et il paraissait fort probable que cette nation réaliserait encore un autre balayage du podium, tout comme prévu.

«Les gars avaient plus de confiance que moi j’en avais,» a indiqué Gough. La petite équipe canadienne est comme une famille, et les athlètes s’épaulent mutuellement et se motivent mutuellement. Ses coéquipiers l’entouraient alors qu’elle attendait en bas de la piste. L’un d’entre eux, Sam Edney, venait justement de boucler la boucle sur sa propre carrière, avec un résultat de sixième place en luge individuelle masculine, la meilleure performance jamais pour le Canada dans cette discipline. Edney et Gough avaient vécu ensemble la majorité des hauts et des bas que le programme canadien de luge a connus; les deux athlètes ont participé ensemble à quatre Jeux Olympiques et d’innombrables évènements de Coupe du Monde et de Championnat du Monde.

«Sam ne laissait pas de répéter, ‘ça va, ça va.’ Je suis tellement heureuse qu’il ait eu raison.»

Lorsque Tatjana Huefner a amorcé sa dernière descente, la championne du monde en titre, médaillée d’or aux Jeux de Vancouver 2010 et médaillée d’argent aux Jeux de Sotchi 2014, avait le potentiel de rayer toute possibilité d’une médaille pour Gough. Et après Huefner, il y avait la championne olympique en titre, Natalie Geisenberger, reconnue comme référence de précision et d’excellence.

«Si vous me regardiez à ce moment-là, je cognais la tête contre la paroi et me disais ‘Nous y revoilà,'» a admis Gough. 

Mais Dame Fortune a enfin souri aux malchanceux lugeurs canadiens lorsque Huefner, en dépit d’un départ ultra-rapide, a franchi la ligne en 46,66 secondes, pour troisième place, plus lente que les 46,574 secondes de Gough, qui s’est soudainement vue élevée en deuxième place, pour garantir une médaille pour le Canada avec une seule compétitrice qui restait en haut de piste.

Tel que prévu, Geisenberger, 30 ans, a fait le nécessaire pour rafler la médaille d’or, avec un chrono total de trois minutes, 5,232 secondes sur les quatre manches. Eitberger, 27 ans, la prétendante qui semble prête à prendre la relève dans le cas où Geisenberger prendrait sa retraite, a fini avec un recul de 0,367 de seconde, et Gough, avec un chrono total de 3:05,644, a terminé au troisième rang, avec un avantage de seulement 0,069 de seconde sur la légendaire Allemande Huefner.

«Ce revirement de situation qui a fini par me procurer la médaille de bronze a été énorme,» a remarqué Gough dans le cadre d’une conférence de presse après l’épreuve. Elle a une histoire de troubler les balayages de podium pour l’Allemagne, et effectivement elle l’a fait une fois de plus, sur la scène où ça compte le plus. 

«C’est la mission que je m’étais donnée pour les Jeux. Je n’ai pas cédé. J’ai exécuté une descente que je croyais bonne, suffisante. Et en fin de compte, cette descente s’est avérée suffisante…j’avais le sens que mes descentes ont été très solides.»

Effectivement, à chaque ronde, toutes les quatre descentes de Gough se sont classées parmi les quatre plus rapides de la manche. Elle a fait preuve d’une régularité vraiment splendide. Au-delà de Huefner, elle a également eu le dessus sur l’Américaine Erin Hamlin qui, il y a quatre ans, avait devancé Gough pour devenir la première non-Européenne à gagner une médaille Olympique de luge.

En fait, Gough n’a pas été la seule Canadienne à devancer Hamlin. Kimberley McRae, 25 ans, a décroché le même résultat qu’elle avait obtenu à Sotchi, cinquième place, faisant preuve du niveau de régularité requis en compétition élite, et faisant signe qu’elle pourrait fort bien être en lice pour une médaille d’ici quatre ans, spécialement si les grandes vétéranes du sport, telles que Geisenberger, Huefner et Gough – toutes dans la trentaine – prennent leur retraite.

Tandis que les plus grands sommets olympiques attendent toujours McRae, mardi soir en Corée, c’était l’apogée de la carrière de sa coéquipière Gough qui, pendant des années, s’était forgée un chemin, cumulant une collection remarquable de podiums en cours de route, incluant deux médailles de bronze au Championnat du Monde, et ayant su se recueillir et revenir encore plus forte après l’énorme déception de Sotchi.

«C’est l’aboutissement de tout ce travail dur. C’est le moment où tout cela rapporte. C’est le produit de quatre années de persévérance, d’une promesse à moi-même de concourir une fois de plus aux Jeux Olympiques, et la récompense pour l’avoir fait.»

Toute humble, Gough est la première à reconnaître que cet achèvement historique ne se doit pas à elle seule.

«Il y a tant de proches qui nous entourent, qui ont fait le trajet en Corée. Toute ma famille y est venue. Je suis tellement heureuse qu’ils soient tous ici, et les mots me font défaut pour exprimer à quel point j’apprécie leur appui. Sans eux, je ne serais pas là où je suis.»